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hannah arendt

  • La parabole de Kafka et au-delà, Hannah Arendt

    kafka  arendt

     

    La parabole de Kafka dit : "Il a deux antagonistes : le premier le pousse de derrière, depuis l'origine. Le second barre la route devant lui. Il se bat avec les deux. [...] Son rêve, cependant, est qu'[...]il quitte d'un saut la ligne de combat et soit élevé, à cause de son expérience du combat, à la position d'arbitre sur ses antagonistes dans leur combat l'un contre l'autre."

    Du point de vue de l'homme, qui vit toujours dans l'intervalle entre le passé et le futur, le temps n'est pas un continuum, un flux ininterrompu ; il est brisé au milieu, au pont où "il" se tient ; et "son" lieu est une brèche dans le temps que "sa" résistance au passé et au futur fait exister. C'est cette insertion qui fractionne le continuum du temps en forces qui commencent alors à se combattre les unes les autres et à agir sur l'homme.

     Cette brèche va de pair avec l'existence de l'homme sur la terre. Il se peut bien qu'elle soit la région de l'esprit ou, plutôt, le chemin frayé par la pensée, ce petit tracé de non-temps que l'activité de la pensée inscrit à l'intérieur de l'espace-temps des mortels et dans lequel le cours des pensées, du souvenir et de l'attente sauve tout ce qu'il touche de la ruine du temps historique et biographique. Ce petit-non-espace-temps au cœur même du temps peut seulement être indiqué, mais ne peut être transmis ou hérité du passé ; chaque génération nouvelle et même tout être humain nouveau en tant qu'il s'insère lui-même entre un passé infini et un futur infini, doit le découvrir et le frayer laborieusement à nouveau.

     

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  • La crise de la culture, Hannah Arendt

    hannah arendt

     

    Notre héritage n'est précédé d'aucun testament.
    Il semble qu'aucune continuité dans le temps ne soit assignée et qu'il n'y ait,
    par conséquent, humainement parlant, ni passé ni futur,
    mais seulement le devenir éternel du monde
    et en lui le cycle biologique des êtres vivants.

     

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  • Condition de l'homme moderne, Hannah Arendt

     Hannah Arendt, Condition de l'homme moderne

     

    La science a réalisé et confirmé ce que les hommes avaient anticipé dans des songes
    qui n'étaient ni creux ni absurdes.

    Si les chrétiens ont parlé de la Terre comme d'une vallée de larmes et si les philosophes n'ont vu dans le corps qu'une vile prison de l'esprit ou de l'âme, personne dans l'histoire du genre humain n'a jamais considéré la Terre comme la prison du corps, ni montré tant d'empressement à s'en aller, littéralement, dans la Lune. L'émancipation, la laïcisation de l'époque moderne qui commença par le refus non pas de Dieu nécessairement, mais d'un dieu Père dans les cieux, doit-elle s'achever sur la répudiation plus fatale encore d'une Terre Mère de toute créature vivante ?

    Il se pourrait, créatures terrestres qui avons commencé d'agir en habitants de l'univers, que nous ne soyons plus jamais capables de comprendre, c'est-à-dire de penser et d'exprimer, les choses que nous sommes cependant capables de faire. En ce cas tout se passerait comme si notre cerveau, qui constitue la condition matérielle, physique, de nos pensées, ne pouvait plus suivre ce que nous faisons, de sorte que désormais nous aurions vraiment besoin de machines pour penser et pour parler à notre place.

    Plus proche, également décisif peut-être, voici un autre événement non moins menaçant. C'est l'avènement de l'automatisation qui, en quelques décennies, probablement videra les usines et libérera l'humanité de son fardeau le plus ancien et le plus naturel, le fardeau du travail, l'asservissement à la nécessité. Cela n'est vrai, toutefois, qu'en apparence. L'époque moderne s'accompagne de la glorification théorique du travail et elle arrive en fait à transformer la société tout entière en une société de travailleurs. C'est une société de travailleurs que l'on va délivrer des chaînes du travail, et cette société ne sait plus rien des activités plus hautes et plus enrichissantes pour lesquelles il vaudrait la peine de gagner cette liberté. Ce que nous avons devant nous, c'est la perspective d'une société de travailleurs sans travail, c'est-à-dire privés de la seule activité qui leur reste.

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