Le Parnassiculet contemporain
Album zutique . Dixains réalistes
La Légende des sexes
Les Déliquescences d'Adoré Floupette
Mitrophane Crapoussin
Extrait de La Muse parodique, Daniel Grojnowski, 2009, José Corti :
p 10-12
[...]
Toute bouffonnerie qui représente les objets en les rendant risibles, accroît notre plaisir, puisqu'à celui de les reconnaître s'ajoute celui de les voir déconsidérés. [...]
"L’œuvre qui pastiche et parodie, introduit constamment dans le sérieux du style noble et direct, le correctif du rire et de la critique", écrit Mikhaël Bakhtine. Au regard du parodiste, tout, sans exception, est comique, toute réalité provoque un rire, à la fois destructeur et régénérateur*. [...]
Il en va autrement, dans la seconde moitié du XIXe siècle, pour la poésie qui, à l'exception des grands recueils romantiques, voit son audience se réduire en peau de chagrin. L'usage des éditions à comptes d'auteurs manifeste une rupture avec le public, qui semble définitive. Celui-ci porte ses intérêts sur les spectacles et il assure en même temps l'hégémonie du roman. Les succès de la "littérature industrielle" par la voie des feuilletons puis des grands tirages, entraînent un amenuisement d'intérêt à l'égard des recueils de vers. [...]
De leur côté, les poètes adoptent des postures de repli. Ils se désengagent au nom de l'art pour l'art, de la "poésie pure", conçoivent leurs écrits comme "un mystère accessible à de rares individualités (Mallarmé). Cette attitude élitiste favorise la multiplication des groupes, des cénacles, des réunions, où des débutants déclament leurs productions. Ecrivains, artistes, bohèmes, publient dans des revues confidentielles et dans des plaquettes qu'ils font imprimer à leurs frais. Contraints à l'isolement, ils forment des cercles d'habitués qui vivent entre eux, en retrait de la société. Leurs jeux, inscrits dans une tradition séculaire, sont destinés à des gens du métier et se distinguent par leur élaboration formelle, leur goût de la virtuosité.
La Muse parodique assemble des publications qui furent tirées à très petits nombres, voire imprimées sous le manteau ou jamais éditées. Elles étaient destinées à de jeunes poètes parisiens, amateurs et initiés qui en déchiffraient sans peine les allusions. Ils se rencontraient dans des tavernes du Quartier latin ou, plus tard, dans des cabarets de Montmartre. [...]
* M. Bakhtine, L’œuvre de François Rabelais [1965], traduction de A. Robel, Gallimard, 1970, p 92-93
Se procurer l'ouvrage :
La muse parodique
Daniel Grojnowski
2009
José Corti
417 pages
http://www.amazon.fr/muse-parodique-Daniel-Grojnowski/dp/2714309909/